Vestiges romains à Antioche de Syrie
Dans les pays du Sud qui bordent la Méditerranée -
et sans doute ailleurs dans le monde – dès qu’arrive l’Eté, chantent les cigales. Ces jolies bestioles, hôtes des contrées ensoleillées, ont une
réputation peu honorable de paresse et
d’insouciance depuis Esope au VIe siècle av J-C…
La célèbre fable de La Fontaine « La Cigale et la Fourmi » a contribué à ruiner la renommée de cette pauvre cigale.
Ce n’est pas l’opinion d’Astérios le Sophiste qui vivait au IVe siècle à Antioche de Syrie au bord de l’Oronte.
Grand théoricien de l'arianisme, hérésie chrétienne très répandue, Astérios devenu évêque à la fin de sa vie, a légué à la postérité plusieurs homélies dont celle reproduite ci-dessous : "Va vers la cigale".
Prenant la parole, probablement devant de nouveaux baptisés, il les
exhorte à prendre exemple sur la cigale en ne causant aucun tort ni à son
prochain ni à à son environnement... Il les invite à mener une vie pleine de
bonheurs simples, en accord avec l'Évangile.
Il dit joliment que la cigale se nourrit de rosée
car, en effet, les cigales se
nourrissent de la sève des arbres. Les cigales jouissent des beautés de la
Création sans la saccager et chantent leur joie de vivre. Précurseur, en cela de l'écologie moderne, il nous offre ici,
du fond des âges d'une manière inattendue et
originale, une belle leçon de vie joyeuse et paisible sous le regard de Dieu.
Voici l'invitation de Astérios le Sophiste :
Va vers la cigale
Comme dit l’auteur des Proverbes : Va vers la fourmi, paresseux, je dis moi :
Va vers la cigale, frère, prends exemple et deviens plus sage encore (Pr
6,6).
De même que la cigale parcourt en volant les champs et les prés et se repose sur les arbres fruitiers, mais sans dépouiller le pommier, sans
léser le noyer, sans grappiller l’olivier, sans dévaster le grenadier, sans faire de tort au cultivateur, se contentant pour son repas de la rosée, jouissant du spectacle des biens d’autrui sans
les piller,
De même, toi, frère, campant en ce monde comme en un champ,
Ne lèse personne, n’escroque personne, ne dénonce personne,
Mais contente-toi (cf. Lc 3,14) de cette rosée : les biens que Dieu te
donne.
Comme la cigale sur l’arbre, sois crucifié au monde, gazouille Paul : Pour moi le monde est crucifié et moi pour le monde
(Ga 6,14)
Oui, de même que la cigale née de la terre échappe d’abord à presque tous les regards, insignifiante, muette, méprisée, mais qu’une fois nourrie de rosée et montée sur l’arbre elle fait entendre à tout le pays son chant harmonieux, de même le Christ à sa naissance était objet de mépris comme une cigale – à preuve ses propres paroles : Moi je suis un ver et non un homme, l’opprobre des hommes et le rebut du peuple (Ps 21,7), mais, après la rosée et l’arbre, après le baptême et la croix, dans le monde entier comme en un champ s’est fait entendre son Evangile. Astérios le Sophiste
Dès l’origine du Christianisme, s’est développée à Antioche une communauté de fidèles du Christ. C’est dans cette ville que les disciples de Jésus prirent le nom de « Chrétiens » Ac (11:26)
Au IVe siècle, avec Rome et Alexandrie, l’Eglise d’Antioche est l’une des plus importantes de la Chrétienté. A l’époque d’Astérios, la brillante Ecole théologique d’Antioche rivalise avec l’Ecole d’Alexandrie et participe aux nombreuses controverses théologiques sur la nature humaine ou/et divinité de Jésus, sur le concept de la Trinité (Dieu UN en Trois personnes), sur l’interprétation littérale ou allégorique des textes bibliques… Controverses souvent meurtrières, ayant peu à voir avec la charité et l’enseignement de Jésus.
On sait peu de chose d'Astérios le Sophiste ce théologien chrétien, élève de Lucien d’Antioche et adepte de l’arianisme. Pourquoi cette appellation de "Sophiste" ou philosophe : est-ce pour le distinguer de son contemporain Astérios de Pétra évêque de Pétra vers 360 ?
Il a écrit le Syntagmation, une synthèse de la doctrine arienne incluant un commentaire des Psaumes et une lettre à Eusèbe. Des fragments de son œuvre préservés par Athanase d’Alexandrie et Marcellus d’Ancyre, ainsi que des homélies sont parvenus jusqu’à nous.
La tendance théologique, répandue dès les origines du christianisme, posait le principe du Dieu UN, (le Dieu de la Septante), suivant lequel le Fils Jésus ne peut être que "subordonné au Père car il a été créé par le Père alors que le Père est, Lui, inengendré et absolument transcendant, au contraire du Fils."
Ce courant de pensée repris par Arius (256-336) de l'Ecole théologique d'Antioche, a donné naissance à l'arianisme, cette doctrine s’oppose l'orthodoxie trinitaire en voie de constitution. L'arianisme nie la divinité de Jésus lui conférant une nature inférieure à celle de Dieu. En 325, le Concile de Nicée consacrera la doctrine trinitaire en condamnant l'arianisme, ouvrant la voie à moult controverses mais hélas à des persécutions et luttes souvent meurtrières entre chrétiens.
Sources
MAGNIFICAT Juillet 2012 N° 236 - Bible - Wikipédia - L'Internaute
Pour aller plus loin...
° Sur l'École théologique d'Antioche et Astérios le Sophiste : W1 et W2
° Sur l'Histoire d'Antioche de Syrie, devenue avec sa région Province turque de Hatay en 1939 : W3
° Sur tous les personnages cités consulter Wikipédia ou d'autres sites sur le christianisme.
° Sur l'arianisme : Définition ICI - Voir aussi : W4 et Imago Mundi
° Sur le Livre des Proverbes : La Bible annotée Voir aussi Pr 6, 6-11
° Consulter le Nouveau Testament pour les références indiquées par Astérios le Sophiste. qui cite aussi le Psaume (21,7), car la prière de Jésus, comme celle des autres Juifs, était la prière des Psaumes.