La fable d’ Esope "Le vieillard et la Mort", que l’on peut lire ci-dessous, a inspiré à Jean de La Fontaine trois autres fables sur le thème de l’Homme face à la Mort:
La Mort et le Malheureux - La Mort et le Bûcheron
La Mort et le Mourant
N'étant pas de celles que l'on apprenait souvent en classe, ces fables ne sont pas des plus connues, mais elles rejoignent les préoccupations actuelles de la société française sur ce sujet, et les débats du Sénat sur l'euthanasie des 25-26 janvier 2011.
Ces fables montrent combien tous les hommes sont attachés à leur existence, aussi misérable soit-elle.
Selon un dicton catalan
"Payer et mourir, on a toujours le temps ! "
Le Vieillard et la Mort
Un jour un vieillard ayant coupé du bois, le chargea sur son dos. Il avait un long trajet à faire. Fatigué par la marche, il déposa son fardeau et il appela la Mort.
La Mort parut et lui demanda pour quel motif il l’appelait. Le vieillard répondit : "C’est pour que tu me soulèves mon fardeau…"
Chez La Fontaine, " La Mort et le Malheureux " (I, fable 15), premier exemple des "fables doubles" est suivie de " La Mort et le Bûcheron " (I, fable 16 – la plus connue des trois : source Esope)
La Mort et le Malheureux
Un Malheureux appelait tous les
jours
La mort à son secours;
Ô Mort, lui disait-il, que tu me sembles belle
!
Viens vite, viens finir ma fortune cruelle.
La mort crut en venant, l'obliger en effet.
Elle frappe à sa porte, elle entre, elle se montre.
Que vois-je ! cria-t-il, ôtez-moi cet objet
;
Qu'il est hideux ! que sa rencontre
Me cause d'horreur et d'effroi !
N'approche pas, ô Mort ; ô Mort, retire-toi.
Mécénas fut un galant homme :
Il a dit quelque part : Qu'on me rende impotent,
Cul-de-jatte, goutteux, manchot, pourvu qu'en somme
Je vive, c'est assez, je suis plus que content.
Ne viens jamais, ô Mort ; on t'en dit tout autant.
La Mort et le Bûcheron
Un pauvre bûcheron, tout couvert de ramée,
Sous le faix du fagot aussi bien que des ans
Gémissant et courbé, marchait à pas pesants,
Et tâchait de gagner sa chaumine enfumée.
Enfin, n'en pouvant plus d'effort et de douleur,
Il met bas son fagot, il songe à son malheur.
Quel plaisir a-t-il eu depuis qu'il est au monde ?
En est-il un plus pauvre en la machine ronde ?
Point de pain quelquefois, et jamais de repos.
Sa femme, ses enfants, les soldats, les impôts,
Le créancier et la corvée
Lui font d'un malheureux la peinture achevée.
Il appelle la Mort ; elle vient sans tarder,
Lui demande ce qu'il faut faire.
C'est, dit-il, afin de m'aider
A recharger ce bois ; tu ne tarderas guère.
Le trépas vient tout guérir ;
Mais ne bougeons d'où nous sommes :
Plutôt souffrir que mourir,
C'est la devise des hommes.
On peut lire la troisième fable : La Mort et le Mourant (VIII.fable I) en cliquant sur la vignette